accessibilité dans les transports"

  • Accessibilité dans les transports : Interview de J-M. Barbier

    "où est la volonté politique de l'État ?"


    À quatre ans de l'échéance de la loi sur l'accessibilité, l'Association des paralysés de France (APF) pointe les retards et parle de "faillite" de la politique du handicap. Interview de Jean-Marie Barbier, président de l'APF, sur la situation dans les transports.

    Transport de voyageurs - Accessibilité dans les transports : "où est la volonté politique de l'État ?"

    Jean-Marie Barbier : ''Il faudra bien, un jour, commencer à rattraper le retard !". © DR


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    Jean-Marie Barbier : "Chez les professionnels du transport, la volonté existe. Nous avons par exemple reçu la FNTV, qui nous dit vouloir faire les efforts nécessaires, mais se trouve confrontée aux atermoiements des AOT. Globalement, l'écart s'est creusé et continue de se creuser.


    Comme je le disais en clôture du congrès de l'Association des paralysés de France à Bordeaux, la politique du handicap en France est aujourd'hui bien mal en point, pour ne pas dire en faillite. Dans une réunion à l'Elysée, des conseillers du président m'ont reproché ces propos, je les maintiens. Je n'ai pas dit que nous étions déjà en faillite. Je considère que différents acteurs (maîtres d'ouvrage, AOT, secteur privé...) ne cessent de tenter de remettre en cause le principe même de la loi.

     

    Sur le sujet de l'accessibilité, on a donné dix ans et on en a déjà presque perdu cinq. Le premier fautif, c'est l'État. Regardez les universités, elles ne sont toujours pas totalement accessibles alors que le gouvernement s'y était engagé pour 2011. Localement, le problème existe aussi.

     

    Les commissions communales d'accessibilité ne se sont pas toutes réunies. On assiste parfois à une partie de ping-pong entre les communes dans le cadre de l'intercommunalité, chacun se rejettant la responsabilité du sujet, sans vouloir le prendre à bras-le-corps.
    Autre exemple : le transport scolaire. C'est un vrai sujet qui n'est pas traité à sa juste valeur. Ce sont souvent des véhicules de troisième main qui assurent ce service. On se dit que ce sont des gamins et qu'ils vont s'entre-aider. Cela ne résout pas le problème. Par ailleurs, je n'accepte plus que l'on nous dise qu'il y a moins d'argent à investir à cause de la crise. Il n'y en avait pas plus avant. Au fil des décrets et des amendements que l'on voit paraître, on sent de la mauvaise volonté.


    Que pensez-vous du texte lui-même ?


    La loi est bien faite. C'est un bon compromis. Le législateur a été plus souple quand il y a des contraintes topographiques avérées. De notre côté, nous avons fait des concessions. Des villes vallonnées (Clermont-Ferrand, Marseille) ont eu des difficultés, nous le reconnaissons bien volontiers. Mais, tout de même, il faut bien commencer un jour à rattraper le retard !


    Au fond, qu'est-ce qui vous gêne le plus ?


    Aucune pénalité n'a été prévue par la loi, l'observatoire mis en place ne l'a été qu'en 2010, et le seul recours sera de mener des actions en justice. On envoie un message terrible à ceux qui ont fait le boulot, puisque leur bonne volonté ne fera pas la différence. Cela vaut pour les transports mais surtout pour les hôteliers et les restaurateurs qui sont les champions de la mauvaise volonté. Les hôteliers, je ne les ai jamais reçus ici dans nos bureaux. Pourtant, avec le passage à la TVA à 5,5%, il avait été question qu'en contrepartie l'accessibilité soit une priorité. Il n'en est rien. Ils refusent tout en bloc.
    Ne pas s'intéresser à cette question et la mettre à la poubelle, ça veut dire qu'on nie ce droit-là aux personnes handicapées.[...]


    Quels sont les bons élèves dans le domaine des transports ?


    La ville de Nantes est ressortie du lot (pour la deuxième année consécutive) de notre enquête annuelle. L'initiative de Grenoble est aussi intéressante. Ils ont élargi les portes d'accès au tramway de manière à ce qu'il soit accessible à tous. Résultat : la fréquentation a gagné 12% depuis ce réajustement. Ce coût financier s'est transformé en bénéfice.


    La SNCF a aussi beaucoup travaillé ces dernières années. Pour la RATP, qui n'est pas le plus en retard, c'est inégal. Le métro n'est pas remplacé par un moyen de transport en surface. Pour nous, c'est simple : la vraie solution pour remplacer le métro, ce serait un bus de substitution toutes les trois minutes. Ce n'est pas le cas. Le Stif a fait trois propositions d'aménagement du réseau, aucune ne respecte la loi. En banlieue, à Orly ou Roisy, je ne sais plus, nous avons un établissement de travail sur le parking d'une station qui n'est même pas accessible pour les personnes handicapées ! C'est le comble."

     

    Propos recueillis par Pierre Cossard et Xavier Renard


    Lire l'intégralité de cet entretien dans Bus & Car n°882 du 3 au 17 juin 2011 :

     

    "Où est la volonté politique de l'État ?"


    Source: WK Transport-Logistique